lundi 30 novembre 2015

Un Coran compliqué


Cavalier seul

Vincent Pellegrini


Le «Figaro Magazine» a consacré un dossier spécial au Coran dans son édition du 14 novembre. Il souligne «le désarroi du lecteur occidental face au Coran» et ajoute: «C’est un livre rempli de violences et d’anathèmes, par exemple, mais qui contient aussi des versets pacifiques. Selon les théologiens musulmans, il ne peut pas y avoir de contradictions dans le livre sacré: quand deux versets se contredisent, le verset antérieur est abrogé par le verset postérieur. Le problème, selon Marie-Thérèse Urvoy, professeur d’islamologie à l’Institut catholique de Toulouse, est que abrogeant et abrogé sont conservés avec le même statut dans le texte définitif et que le Coran n’est pas classé chronologiquement. Les spécialistes occidentaux soulignent  notamment  que les versets interdisant le meurtre et prônant la tolérance religieuse  avec juifs et chrétiens ont été abrogés par un verset qui commande de tuer tous ceux qui associent un autre être au culte du Dieu unique (red. par exemple les personnes de la Sainte Trinité), à moins qu’ils n’acceptent un statut de soumission pour échapper à la mort (Coran IX-5). Cependant, d’autres exégètes musulmans contestent qu’il y ait eu abrogation des versets initiaux…»  Les choses sont compliquées car l’islam classique tient aussi compte de sa deuxième grande source des hadiths, c’est-à-dire la relation des actes et des paroles de Mahomet et de ses compagnons, «qui constituent la matière de la Sunna (la Tradition), laquelle a force de loi». L’islam classique se réfère enfin aux interprétations des légistes classiques de l’islam (droit musulman). Le problème avec le Coran, c’est qu’il est la parole même de Dieu dictée en arabe à Mahomet, ce qui rend difficile l’exégèse et la contextualisation car il s’agit d’un texte incréé et éternel. Le Figaro explique que certains aimeraient reprendre la tradition mutazilite, école théologique musulmane présente dès le IXe siècle, pour qui Dieu a laissé aux hommes la puissance d’agir librement et pour qui le Coran a été créé, ce qui signifie que le livre sacré est distinct de Dieu. Mais dans les pays de culture musulmane ces voix sont étouffées. Les défenseurs d’un islam des Lumières vivent en Occident et écrivent pour les occidentaux. L’enjeu, pour l’Europe, est donc d’avoir un islam d’Europe plutôt que l’islam en Europe. Or, l’islam a tendance à se radicaliser…

lundi 23 novembre 2015

Intégration ratée


Cavalier seul

Vincent Pellegrini
  -         Les attentats de Paris ont révélé une piste belge. Ce n’est pas étonnant car la Belgique a raté sa politique d’intégration des musulmans. Cela ressort d’un sondage mené par le très sérieux WZB allemand (centre de recherches en sciences sociales) auprès de musulmans belges. Il révèle que 66% des musulmans interrogés (420 000 si l’on traduit ce pourcentage à l’échelle du pays) sont pour un retour à l’islam des origines (salafisme), que 82% (520 000), estiment  que tous les musulmans doivent s’en tenir à l’interprétation stricte du coran (intégrisme) et que 70% (450 000) estiment que la loi islamique (charia) doit primer sur les lois belges (islamisme).

-         La Hollande, dont 6 % de la population est musulmane, rejette dorénavant le multiculturalisme. Le gouvernement hollandais a abandonné son modèle de longue date de multiculturalisme, qui n'a fait qu'encourager les immigrants musulmans à se créer une société parallèle à l'intérieur du pays. De fait, la nouvelle politique d'intégration hollandaise est devenue beaucoup plus exigeante envers les immigrants.

-         Le procureur du canton des Grisons a classé sans suite les plaintes déposées contre Mgr Vitus Huonder après ses «déclarations sur les homosexuels» en juillet lors d’une conférence sur la famille, nous apprend l’agence APIC. Le procureur a estimé qu’en citant deux passages de la Bible qualifiant notamment les actes d’homosexualité d’«abomination», l’évêque de Coire ne pouvait pas devoir répondre d’incitation à la violence ou à la haine. L’association LGBT de Suisse, Pink Cross, avait alors immédiatement réagi en qualifiant Mgr Huonder d’«agitateur» et de «délinquant» tout en exigeant «des excuses publiques». Des plaintes avaient même été déposées. En réponse à la polémique qui enflait dans les médias suisses, Mgr Huonder avait publié un communiqué sur le site de son diocèse. Il y regrettait un «déplorable malentendu» et affirmait qu’il n’avait «en aucune façon voulu rabaisser les personnes homosexuelles», tout en rappelant sa fidélité au catéchisme de l’Eglise catholique sur ce sujet. Catéchisme qui prône le respect envers les personnes homosexuelles, mais condamne les actes d’homosexualité.

-         L’académicien René Girard s’est éteint le 4 novembre dernier à l’âge de 91 ans. Franc-tireur et penseur original il s’est converti au christianisme après ses recherches sur les Evangiles. 

 

 

lundi 16 novembre 2015

En attente de clarification


Cavalier seul

Vincent Pellegrini

-                   Le Valaisan Bernard Fellay, supérieur général de la Fraternité sacerdotale saint Pie-X (Ecône) a déclaré notamment à www.dici.org sur le synode de la famille qui s’est terminé à Rome: «Le Rapport final de la seconde session du Synode sur la famille, publié le 24 octobre 2015, loin de manifester un consensus des pères synodaux, est l’expression d’un compromis entre des positions profondément divergentes. On peut y lire certes des rappels doctrinaux sur le mariage et la famille catholique, mais on note aussi des ambiguïtés et omissions regrettables, et surtout des brèches ouvertes dans la discipline au nom d’une miséricorde pastorale relativiste. L’impression générale qui se dégage de ce texte est celle d’une confusion qui ne manquera pas d’être exploitée dans un sens contraire à l’enseignement constant de l’Eglise.» Mgr Fellay veut sans doute parler, notamment, des paragraphes sur les divorcés remariés pour lesquels la plupart des observateurs notent que l’accompagnement et le discernement spirituel par un prêtre peuvent aller jusqu’à la communion donnée à ces mêmes divorcés-remariés. La doctrine du for interne et la théologie de la miséricorde supplanteraient ainsi  la norme doctrinale. Le synode étant un organe consultatif, on verra quelle décision le pape prendra sur cette question pas tout à fait claire.

-                   L’arrivée attendue d’un million de migrants en Allemagne, dont beaucoup de musulmans, suscite un vif débat outre-Rhin sur l’intégration de ces réfugiés. On sait en effet que l’islam classique n’est pas compatible avec les normes fondamentales des démocraties occidentales. Certaines voix se lèvent ainsi en Allemagne pour faire signer aux migrants une charte. Par celle-ci, les migrants accepteraient l’ordre légal, l’égalité hommes-femmes, la liberté religieuse et de conscience, la liberté de changer de religion, la suprématie du droit allemand sur le droit islamique, etc.

-                   On parle beaucoup de l’Etat islamique, mais le groupe Boko Haram fait lui aussi régner la terreur, sans parler d’autres groupes djihadistes qui frappent les chrétiens. Au Nigéria, par exemple, alors que Boko Haram sévit surtout dans le nord-est du pays, d’autres groupes islamistes attaquent régulièrement des villages chrétiens dans des régions du nord-ouest et du centre du Nigéria, ce qui a déjà fait plus de 10 000  morts et plus de 300 000 déplacés. 

 

lundi 9 novembre 2015

Révolution papale


Cavalier seul

Vincent Pellegrini
Un événement important a eu assez peu d’écho dans les médias. Pourtant, devant les Pères synodaux, le pape François a fait un discours fondateur pour appeler à «une conversion de la papauté» par une décentralisation et une synodalité de l’Eglise. C’est un changement important pour l’exercice de la papauté qui se rapproche de la vision des orthodoxes. Le pape a notamment déclaré: «La synodalité, comme dimension constitutive de l'Eglise, nous offre le cadre interprétatif le plus adéquat pour comprendre le ministère hiérarchique... en soi, personne ne peut être élevé au-dessus des autres. Dans cette Eglise, comme dans une pyramide retournée, le sommet se trouve être la base. Dans une Eglise synodale, le Synode des évêques est seulement la manifestation la plus évidente d'un dynamisme de communion qui inspire toutes les décisions ecclésiales.» Le pape ne veut pas gouverner seul. Il prend toutes ses décisions importantes avec un groupe de neuf cardinaux. Dans sa vision, les conférences épiscopales auront plus de liberté  par rapport à Rome. En effet, le pape continue: «Dans une Eglise synodale, comme je l'ai déjà dit, il n'est pas opportun que le Pape remplace les épiscopats locaux dans le discernement de toutes les problématiques qui se posent sur leurs territoires. En ce sens, je pense qu'il devient nécessaire de procéder à une salutaire décentralisation. Et le Synode des évêques, représentant l'épiscopat catholique, devient l'expression de la collégialité épiscopale à l'intérieur d'une Eglise toute synodale». Et enfin, le pape François explique: «Le Pape n'est pas seul, au-dessus de l'Eglise, mais au-dedans d'elle comme baptisé entre les baptisés et dans le Collège épiscopal comme évêque parmi les évêques, appelé en même temps, comme Successeur de l'apostolat de Pierre, à guider l'Eglise de Rome qui préside dans l'amour toutes les Eglises. Alors que je rappelle la nécessité et l'urgence de penser à une conversion de la papauté... je suis convaincu à ce sujet d'avoir une responsabilité particulière, constatant l'aspiration œcuménique de la majeure partie des communautés chrétiennes et écoutant la question qui m'est posée de trouver une forme d'exercice de la primauté qui, bien que ne renonçant en aucune façon à l'essentiel de sa mission, s'ouvre à une situation nouvelle.»

lundi 2 novembre 2015

Un synode réformateur


Cavalier seul

Vincent Pellegrini

Le Synode sur la famille s’est terminé dimanche à Rome. Le pape doit encore en accepter le texte. Deux sujets agitaient les médias: l’homosexualité et l’accès à la communion des divorcés remariés. Le cardinal Schönborn a expliqué que le texte final du Synode ne contient pas grand-chose sur l’homosexualité. Tout d’abord parce que le thème de l’homosexualité est traité «sous l’aspect de la famille qui fait l’expérience d’avoir un de ses membres qui est homosexuel»: «Comment gérer la situation en chrétiens?» Il a rappelé aussi que le Catéchisme de l’Eglise catholique est très clair sur l’homosexualité, ainsi que les «règles de la pastorale claires et classiques». Et d’ajouter: «Chaque personne mérite le respect dû à toute personne même si certains comportements sont vus par la Bible de façon différente de beaucoup d’opinions d’aujourd’hui.»

 Restait le chapitre âprement disputé sur les divorcés remariés. Et là il y a une ouverture en direction des divorcés remariés, malgré une assez forte opposition minoritaire lors du vote. «Le Figaro» indiquait sur son site internet de dimanche dernier: «Loin d'un feu vert pour la communion pour tous les divorcés remariés, c'est en fait la proposition des évêques allemands qui a fini par emporter cette adhésion majoritaire même si l'opposition à cette mesure a été très puissante pendant tout le synode. Et, le demeurera, en particulier de la part des épiscopats africains et polonais qui ont voté contre car ils estiment que cette mesure de clémence risquera d'affaiblir, à la longue, l'institution du mariage catholique. Le groupe germanophone a en effet proposé de mettre au point une série de «critères» pour évaluer - sous la responsabilité de l'évêque local - l'histoire de chaque couple de divorcés remariés qui seraient réellement motivés pour accéder aux sacrements de l'Eglise. Sous la conduite de leur prêtre ils pourraient évaluer, préparer et décider au final de leur éventuelle admission à la confession et à la communion. Il s'agirait, à chaque fois, insiste-t-on à Rome, de l'œuvre d'un «discernement» spécifique selon des critères détaillés dans le fameux paragraphe 85.» Bref, le pape qui voulait une réforme de la pastorale l’a obtenue. On assistera à un changement de la pastorale du mariage même si le mot communion eucharistique ne figure pas dans le texte synodal.